Françoise Petrovitch

« Rompre »

Immédiatement ce qui est frappant dans le travail présenté au Musée de la Vie

Romantique, (jusqu’au 10 septembre) c’est à la fois sa légèreté et sa simplicité.

On entendra aussitôt qu’en vérité, ce sont des faux-semblants, que si le travail

est empreint de ces deux caractères, c’est pour mieux dissimuler, complexité et

pesanteur. C’est ici confondre la qualité de l’œuvre et son processus de

fabrication. Peut-être l’auteure de l’œuvre était-elle animée d’idées sombres

qu’elle aurait exorcisées en s’imposant une œuvre faite de légèreté et de

simplicité ?

On s’en moque un peu. Ce n’est pas l’auteure qui est accroché aux cimaises

du Musée, mais des œuvres peintes, des couleurs, des formes et des luminosités

qui s’adressent au regardeur et le font accéder à un monde justement fait de

légèreté et de simplicité.

 

Parmi les images proposées, l’une dit, très nettement ce qu’on doit entendre par

là : le portrait d’une jeune fille, (femme) en train d’allumer une cigarette. C’est

important d’allumer une cigarette ? sûrement pas ! Ce qui importe,

c’est qu’en très peu de traits et de couleurs, l’auteure fait de ce geste simple,

exprimé simplement, un moment de grâce, d’attention et d’équilibre. La lumière

contenue dans cette œuvre tient à la luminosité contenue dans des dégradés de

bleu et la couleur jaune des ongles. Incongruité ? Pas du tout, la lumière de la

flamme cachée par les mains est sublimée par la stridence du jaune et le tableau

y trouve profondeur et équilibre. Ce très beau tableau est aussi une œuvre sur le

moment critique, dans un geste infime, à la durée epsilonesque. Ce moment

décompté en fractions de secondes est aussi un moment de concentration sans

drame. Une concentration simple et légère, qui pourrait bien durer une éternité.

L’exposition décline à merveille ce sentiment en de nombreuses œuvres dont

certaines de très grand format, toutes très bien équilibrées, toutes doucement

lumineuses, toutes qui donneraient une forme à un sentiment d’éternité.